No PAIN no GAIN ?
- Par sunyatazenconseil
- Le 12/11/2014
- Dans ZEN
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Nous ressentons tous - peut-être à des degrés divers et pas de manière continue - un fort sentiment d'insatisfaction dans nos vies.
Il y a bien des éclairs de complétude qui illuminent ce ciel d'orages permanents mais à croire qu'ils n'existent que pour mieux nous replonger dans l'obscurité la plus désespérante.
Le Bouddha historique nous a transmis qu'il existe pourtant quelque chose, un truc, qui "n'est-pas-né", sans origine, sans condition, sans forme. S'il n'existait pas ce "quelque chose", il n'y aurait aucun moyen pour nous de "s'échapper" du "né", de ce qui a une origine, une forme. Il parle ainsi de la réalité psychologique de notre monde que nous pensons être "notre" monde et il nous encourage à l'examiner, à l'observer avec la plus sincère et résolue attention par l'intermédiaire de nos six sens (le mentale discriminant étant le sixième).
A bien y réfléchir absolument rien ne nous est perceptible au-delà de ces cinq portes (autant dire que le spectre est faible un peu comme appréhender le monde depuis sa fenêtre !). Il nous exhorte donc à devenir intime avec nous-mêmes, à nous comprendre par l'expérience, la pratique afin de souffler une bonne fois pour toute le voile de l'ignorance ...
Dans son enseignement Bouddha nous enjoint à étudier ce qui obstrue cette Paix Ultime, d'en faire l'expérience concrète afin d'être en mesure d'abandonner notre vieille carapace usée par trop de préjugés. Ceci est l'affaire de toute une vie car il ne nous est pas naturel de nous tourner de prime abord vers ce qui ne représente pas un gage de satisfaction immédiate. Voilà pourquoi le premier sermon du Bouddha parle de D U K K H A (souffrance inhérente à l'ignorance de notre nature profonde ou perpétuelle insatisfaction) ; "J'enseigne dukkha et la fin de dukkha."
Existence de dukkha et moyen de remédier à dukkha sont intimement liés car comment mettre fin à quelque chose qu'on ne connaît pas? C'est seulement en allant au coeur de nos difficultés - à condition de ne pas en ressortir détruits ! - que nous serons capables d'aller au-delà ; C'est dans la boue de l'existence que la fleur de lotus débute son ascension vers la lumière.
Pour le pratiquant zen, dukkha est donc un sujet de prime importance, et il n'y a rien de pessimiste là dedans, c'est une approche pragmatique de la connaissance de soi qui vise à ne rien rejeter d'emblée et ne rien saisir à priori. Nous avons tendance à occulter nombre de nos expériences, sensations et/ou sentiments car nous ne supportons pas la souffrance qui en résulte trop souvent.
Afin de nous permettre de réellement vivre (à défaut d'apprécier) notre existence, nous devons développer cette sorte de confiance ou foi, seule capable de laisser aller notre besoin d'emprise sur le monde, notre environnement, nos proches, notre tendance à vouloir tout maîtriser, à rendre notre vie confortable ... supportable. Etre présent à chaque instant, à chacun de nos souffles comment s'il s'agissait du dernier, cesser de se projeter, cesser de regretter ... Dans notre pratique de la méditation, nous avons des moments de pleine attention bien sûr mais la difficulté réside encore dans la transposition au quotidien et dans la durée de ces véritables perles d'absence de "moi manipulateur" douce et bienveillante.
Cela ne signifie pas que le moi, le monde, les phénomènes sont des erreurs ou qu'ils n'existent pas mais c'est l'erreur ou plutôt l'ignorance dans lequel tout ceci par habitude nous maintient dans l'obscurité de notre nature véritable.qui est en cause. Nous ne pourrons vivre la libération - qui selon le Bouddha est à notre portée - que si nous sommes en mesure de rompre cette chaîne de causalités avec laquelle nous entretenons notre souffrance. La première étape consiste donc à la re-co-naître comme telle, à l'accepter même...
Dukkha pour nous est inévitablement souffrance du fait de trop d'identification avec elle. Notre activité mentale inconsciente nous entâche et nous attache nous conduisant à nous battre continuellement avec des évènements douloureux qu'ils soient d'ordre physiques ou émotionnels ... que ce soient de profonds traumatismes ou de légers bobos. C'est aussi le cas dans nos méditations lorsque nous nous apercevons que nous sommes englués dans un flot de pensées oubien dans une sensation ou émotion gênante, notre "moi" étant limité cela s'accompagne d'une sensation de souffrance mentale. Aussi notre rôle est de reconnaître cela, d'accepter le combat sans se juger, avec bienveillance ... Cela c'est dukkha, ce que je ressens là, ma crispation, ma colère, mon chagrin, ma difficulté à simplement être, ... C'est dukkha. Laissons notre attention se déployer dans ce combat particulier ou l'autre est finalement plus partenaire qu'adversaire. Nous permettons que cela s'exprime ... enfin. Sans jugement, sans crainte ... Paisiblement.
Au fur et à mesure de notre pratique, examinant consciensieusement dukkha avec ouverture d'esprit, bienveillance et relâchement des tensions qui s'expriment dans notre corps, notre sentiment de confiance s'accroit jusqu'à nous rendre capables de supporter (contraintes de cette posture exigeante et durée des séances) ce qu'avant nous aurions jugé insupportable.
"Alors oui cela fonctionne, c'est la bonne voie."
Malgré tout nous avons un refus de voir la réalité en face, ; "Je désire ce qui me conforte et je pense que l'herbe est toujours plus verte ailleurs". Cette attitude profondément ancrée est le lot de tout quidam et c'est pour cela que le Bouddha lui-même avait hésité en qualifiant son enseignement : "à contre courant". Tout ce que nous dit le Grand Homme revient à regarder dukkha en face, à devenir intime avec dukkha tout comme devait finir par l'être un soldat de la grande guerre au fond de sa tranchée (commémoration 100 ans - 11 novembre 2014) ... Dans la boue et au milieu de la mitraille, jusqu'où sont allés ces jeunes gens, vers quel dépassement ? ... A l'orée de leur dernier souffle ont-ils pu tutoyer la souffrance et quitter ce monde de fureur l'esprit en paix ?
Bien sûr nous manquons souvent de courage. Nous sommes conditionnés. notre culture, notre éducation, ... Toutes ces "couches" qui recouvrent notre être profond et qui ne laisse pas (plus) passer la lumière. Nous pensons que tout le monde sauf nous parvient à être heureux, nous prenons des avis, nous débutons certaines pratiques, nous cherchons à "l'extérieur" ce qui en définitive ne peut se trouver qu'à "l'intérieur" indépendamment de notre environnement, de nos expériences ... Bouddha a enseigné maintes choses qui nous renvoient à nous-mêmes nous exhortant à devenir notre "propre flambeau".
La première Noble Vérité dit que dukkha existe. Ceci doit être bien compris. La seconde dit qu'il existe une cause à dukkha. Et donc si dukkha est par nature "conditionné", il existe troisième Noble Vérité, un chemin qui conduit à la cessation de dukkha. Par la pleine compréhension de la cause (plus que la suppression ou la maîtrise), l'effet cesse de lui-même. Nous retrouvons là le sens du mot NIRVANA : cessation, le feu en nous cesse de brûler faute de carburant pour l'alimenter. Ce chemin, quatrième Noble Vérité, est l'octuple sentier dans lequel nous retrouvons un élément essentiel pour nous qui est LA PRATIQUE REGULIERE DE LA MEDITATION.
Cette Voie c'est l'observation de dukkha et l'abandon de sa cause à chaque moment, souffle après souffle. Il ne s'agit pas de quelque chose d'insurmontable car il suffit de s'occuper des choses l'une après l'autre, instant après instant. Résolument, patiemment. C'est difficile mais pas impossible. En fait il n'y a rien à atteindre, rien à devenir, seulement permettre ... Permettre et oser au risque de ... Au risque de quoi au juste ? Qu'avons nous à perdre ? Ne sommes-nous pas déjà "condamnés" ... à réussir !
B o n n e P r a t i q u e !
bouddha impermanence mujo dukkha
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