ShoDô by Nomiya
- Par sunyatazenconseil
- Le 12/12/2011
- Dans NIHON
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Petite chronique japonaise by Nomiya-san
Quand Shodô, la Voie de l’Ecriture, rejoint Butsudô, Voie du Bouddha …
La calligraphie japonaise et le zen
Au 1er siècle de l’ère chrétienne, les Japonais apprennent le chinois afin de pouvoir communiquer par écrit. Ils ne possèdent pas alors, d’écriture propre ni d’alphabet.
C’est à la création de la nouvelle capitale de Heian (aujourd’hui Kyoto) à la fin du VIIIe siècle qu’on commença à utiliser des caractères chinois pour écrire du japonais. On s’appropria d’abord les idéogrammes appelés kanji, mais comme ils ne suffisaient pas, on mit au point parallèlement une représentation graphique des syllabes, nommés kana, purement phonétiques, eux-mêmes subdivisés en katakana et hirigana. Le Japon qui jusque là ne disposait d’aucune écriture, en avait désormais trois.
Au début, les hiriganas sont appelés « onnade » ou écriture de femme, que les hommes se sont appropriés bien après.
La grande littérature japonaise est née au Xe siècle, inventée par des femmes. Le Japon était jusque-là imprégné de poésie, généralement chantée. C’est cependant avec l’époque de Heian que s’écrivent des œuvres de fiction ainsi que des journaux intimes signés par des femmes de cour comme Murasaki Shibuku, ou Sei Shonagan, Sarashina et d’autres.
Dans le monde excessivement élégant et raffiné de la cour de Heian, ces femmes de cour, écrivains et courtisanes, vont imposer leur style d’écriture.
Au lieu des caractères chinois qu’elles connaissent pourtant très bien , elles préfèrent utiliser les hirigana qu’elles tracent de façon admirable sur des ryûshi, papiers de plus en plus précieux : la calligraphie purement japonaise vient de naître !
...
Une nouvelle source d’évolution arrive avec le bouddhisme dont la pénétration dans le Japon a débuté au Ve siècle, et dont la branche t’chan ou zen apparaît au VIIe siècle.
Le zen préconise la calligraphie comme activité à la fois physique et spirituelle permettant une libération de l’esprit et un rejet de tous les dogmes. Les tendances sont à la provocation, à la turbulence, à la libération des énergies. C’est dans ce style très expressif qu’apparaît le bokuseki, inventé par les moines zen. Littéralement bokuseki signifie traces de l’animal sauvage.
Etrangement le zen va s’exprimer par le pinceau, source de délires et de provocations de toutes sortes. La calligraphie se présente d’abord pour les moines bouddhistes comme une contre-culture défiant l’austérité et les règles établies par la société des samouraïs, contre-culture qui sera à son tour récupérée par les pouvoirs en place et des guerriers plus raffinés.
Le shodô ou sho est le support d’une philosophie, d’un art de vivre, d’une civilisation. L’art de la calligraphie est l’objet, au Japon, d’une très haute considération.
A un niveau avancé, rien que la préparation de l’encre devient un exercice proche du zazen !
De manière identique la posture du corps, la respiration, la concentration et la libération des énergies sont essentielles. La calligraphie se pratique avec le corps tout entier. Le corps doit être souple, détendu et serein pour le maniement du pinceau, pour effectuer des mouvements amples et surtout pour les enchaîner. Cet enchaînement est appelé kimyaku ou enchaînement du ki, le ki étant le souffle, l’énergie, l’âme, l’esprit, l’humeur …
Grâce au kimyaku , les caractères ne sont pas des traits distincts , mais un tout vivant. Il faut l’avoir constamment à l’esprit et ne pas s’arrêter sinon il serait mort. Le corps tout entier accompagne le mouvement du pinceau jusqu’à son achèvement complet d’où l’importance de la respiration.
Aucun caractère n’est facile. « Tomber sept fois se relever huit », dit un proverbe japonais. Il faut beaucoup de discipline si bien que l’initiation à la calligraphie s’apparente souvent à celle des arts martiaux
Nombre de grands calligraphes du Japon ont été des maîtres du sabre et du pinceau, et beaucoup d’entre eux furent aussi des moines zen !
Il ne nous reste plus qu’à apprécier les calligraphies en compagnie de moines zen lors d’une cérémonie du thé, car le sadô ou « voie du thé » est aussi fondée sur le zen ….
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