Bûche et Cendre selon Dôgen

buches.jpgUne fois réduites en cendres, la bûche ne peut redevenir bûche. Il ne faut pourtant pas penser que la cendre représente le "futur" de la bûche et la bûche son passé. Vous devez bien comprendre que bien que la bûche se maintienne dans sa position dharmique* de bûche avec un "avant" et un "après", elle n'en transcende pas moins cet avant et cet après. De son côté, la cendre se maintien également dans sa position dharmique de cendre avec son "avant" et son "après".

De même que la bûche une fois réduite en cendres, ne peut redevenir bûche, les hommes, une fois morts, ne peuvent revenir à la vie.

cendres.jpgCela dit il est une évidence dans l'enseignement de la Réalité (dharma) du Bouddha de rejeter l'idée que la vie devienne mort. De ce fait, la naissance est vue comme "non-naissance". Que la mort elle-même ne devienne pas vie est ce que nous nommons "mettre en mouvement la roue du dharma". C'est la "non-extinction".

Vie et mort ne sont que des "positions" dans le temps comme peuvent l'être l'hiver et le printemps. Vous ne dites pas l'hiver est la "naissance" du printemps, pas plus que l'été n'est la "mort" du printemps.

Dôgen Zenji  -  GENJÔKÔAN

* C'est-à-dire l'expression phénoménale (le niveau d'existence) d'un "objet" à son stade unique, non reproductible.

Nous pensons habituellement que naissances et morts alternent de manière perpétuelle tout comme l'enchaînement des saisons. Pour le spectateur "immobile" que nous pensons être le mouvement est à "l'extérieur". Demain succèdent à aujourdh'ui, la nuit au jour, le printemps à l'hiver et la mort à la vie. Inexorablement le temps s'écoule et nous avec ...

Nous sommes pareils au pêcheur dans sa barque qui voit défiler le paysage et qui ignore le déplacement même de sa propre embarcation oubien comme le spectateur bien assis dans son fauteuil dont l'oeil donne mouvement et vie à une juxtaposition d'images fixes (à minima 24 par seconde) baignées de lumière.

Mais si comme le dit le maître zen le temps ne passe pas, la rivière ne s'écoule pas vers l'océan, la tempête qui hurle à tous vents et ébranle la montagne est toujours "en repos" et le soleil et la lune en décrivant leurs orbites ne tournent pas. Alors, qui bouge ? Qu'est-ce-qui bouge ?

La vie ne devient pas la mort tout comme de la mort ne peut naître la vie.

Nous pensons être ce pêcheur dont la barque est immobile ou ce spectateur simplement assis, mais il n'en est rien, nous sommes cet "ÊTRE TEMPS" dont parle Dôgen, nous ne sommes pas ce point immobile, cet observateur "extérieur" qui regarde la marche du monde comme un spectateur un film. Nous sommes plutôt le "contenant" (le projectionniste, la bobine et l'appareil !) de toutes ces images de notre propre existence que nos yeux projettent tout autour de nous en formes colorées et chatoyantes.

Une pure illusion, une simple projection.

Nous SOMMES le mouvement. Nous créons naissance et mort, l'enchaînement des images, la succession des instants à une vitesse de plus en plus effrénée d'ailleurs (les "anciens" vous le confirmeront) d'autant plus que nous nous rapprochons de la fin de la pellicule ... La fin du film qui est rarement un "happy end" (pour les proches) faut bien l'avouer.

La fin du film n'est pas la fin de notre vie, c'est indéniable. La fin de quoi d'ailleurs ? Un début ? Quelle est cette REALITE que nous avons occultée depuis le début (de la projection) et qui va finalement nous sauter ... aux yeux ?

Lors du dernier éclair ...Lorsque vraiment nous devenons parfaitement immobiles. Après la toute dernière image que se passe-t-il ?

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réalité Conscience bouddhisme mujo dogen

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